Interview avec le maître de l'épouvante, Junji Ito

par Lynzee Loveridge,
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Junji Ito était l'un des invités de la Virtual Crunchyroll Expo, où il a notamment parlé de son manga Le Journal des chats, disponible en France aux éditions Delcourt. L'auteur, qui arbore désormais le prix Eisner, a été approché par notre équipe afin de répondre à quelques questions pour cette courte interview, que vous pouvez apprécier sans attendre davantage :

Dans Le journal des chats, vous avez été capable de capturer les « horreurs » des propriétaires d'animaux, d'une manière fraîche et amusante. Je me demande, Après le décès de Yon, avez-vous accueilli de nouveaux animaux dans votre vie ?

Junji Ito : Depuis que Yon et Mu se sont éteints, j'ai adopté deux nouveaux chats. Lorsqu'ils ont faim, ils viennent jusqu'à la porte de ma chambre et jouent avec la poignée, essayant de l'ouvrir, ce qui fait beaucoup de bruit. J'ai également déjà eu dans le passé des coléoptères, et ma fille en a trouvé un dans la maison, que nous gardons désormais. Mon épouse a également quatre lézards.

Ces dernières années, beaucoup de vos personnages ornent des vêtements, aux Etats-Unis. Participez-vous à l'élaboration de cette gamme de mode Junji Ito ? Comment décririez-vous votre style ?

Junji Ito : Je n'ai aucun sens du style, et j'ai du mal à m'habiller de manière à avoir l'air présentable. Comme je n'ai pas vraiment confiance en mon corps, je choisis toujours des vêtements qui n'attirent pas l'attention. Ceci étant dit, je n'ai pas de requête particulière quant aux vêtements utilisant mes personnages.

Les symboles peuvent être une formidable source d'épouvante au niveau primordial. En quoi pensez-vous que Spirale (Uzumaki) dérange les gens ?

Junji Ito : Une Spirale à la surface de l'eau est capable d'attirer ce qui flotte dans les profondeurs, et je pense qu'il y a une peur inhérente à ce phénomène. Le fait que le centre d'une Spirale ne conduise que dans des profondeurs toujours plus obscures a quelque chose de glaçant en ce que cela implique l'infini.

Votre histoire courte The Enigma The Amigara Fault (ndt : l'histoire est disponible à la fin du manga Gyo) est probablement l'une des plus connues parmi les lecteurs anglophones. Comment avez-vous conceptualisé cette histoire et comment décririez-vous les éléments qui la rendent effrayante ?

Junji Ito : The Enigma The Amigara Fault démarre sur « un trou qui a la forme d'un humain ». De là, plusieurs questions émergent : « Et si ce trou vous correspondait parfaitement ? Qui l'aurait fait ? Où conduirait-il ? » Je pense que si quelqu'un.e se trouvait effectivement à l'intérieur de ce trou, iel se sentirait piégé.e. Il y a une part de cela qui est liée à mes propres peurs, comme la dissonance que l'on ressent en entendant sa propre voix dans des enregistrements ou en se voyant en vidéo ; ce genre de malaise que l'on ressent en se voyant de l'extérieur. Les Doppelgangers, en tant que concept, sont quelque chose dont je suis friand, et je pense que ce concept marche pour Amigara.

Plusieurs histoires d'horreur mettent l'accent sur des anxiétés particulières, des obsessions, ou des émotions dont on perd le contrôle. Pensez-vous que l'une d'entre elles est récurrente à vos histoires ?

Junji Ito : L'un des thèmes principaux de Tomie est le narcissisme, poussé à l'extrême. Il y a d'autres de mes histoires qui tournent sur cet amour égocentriste. Je pense que cet égocentrisme est quelque chose que nous partageons tous, à un degré plus ou moins poussé, et ; en l'exagérant, on obtient quelque chose auquel les lecteurs peuvent s'identifier. A cela, on trouve d'autres éléments qui sont intrinsèquement liés, comme la dépendance et l'anxiété, cette dernière au cœur de plusieurs émotions. Le chemin qui mène à la peur est l'anxiété, je pense, et je dirais que la majorité des actions des humains (et même des animaux) sont justifiées par un désir de calmer cette anxiété.


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